03/09/2024

Garou éclectique


Garou éclectique

Garou a joué de la trompette dans la fanfare des Forces canadiennes, interprété Plume Latraverse et Wilson Pickett dans les bars, tenu le rôle de Quasimodo dans Notre-Dame de Paris. Voilà maintenant qu'il «cambriole» les répertoires d'artistes comme Aznavour et Rod Stewart.

Portrait d'un artiste éclectique.

Il ne faut pas voir dans cette multiplicité d'allégeances et d'influences un manque de direction. En réfléchissant sur son parcours et ses choix, l'artiste originaire de Sherbrooke dit se considérer davantage comme un «entertainer» que comme un chanteur ou un comédien.

Bien qu'il ait intégré la maîtrise de plusieurs instruments et ait fait partie d'un groupe au secondaire, c'est à 19 ans que la piqûre de la scène a orienté le reste de son parcours. «C'est un soir qui a changé ma vie. Comme dans un film», se souvient Garou en évoquant cette soirée où il avait suivi une amie au spectacle d'un chansonnier.

«Mon amie le connaissait et elle s'est arrangée pour qu'il me fasse monter sur scène. J'ai été tétanisé. Le monde en redemandait! Je me suis senti bien sur scène. Je n'avais jamais été seul sur un stage. Pendant que je jouais, la barmaid a appelé le boss, a mis le téléphone sur le speaker et lui a dit de venir me voir», raconte-t-il.

C'était un samedi. Le mardi suivant, le propriétaire du bar a proposé à Garou d'y jouer les jeudi, vendredi et samedi d'après. En deux jours, le jeune homme s'est procuré de l'équipement de son et d'éclairage et s'est constitué un répertoire en rassemblant des paroles et des accords de chansons auprès de ses amis.

Le contrat de trois soirs a finalement duré six semaines. «Je jouais de toutes sortes d'affaires. J'aime de tout. En fait, je n'ai pas envie de me trouver, j'ai envie de me chercher!», lance Garou en mélangeant le passé et le présent, et en faisant un lien avec son intérêt pour l'archéologie («J'aime chercher!»)

Parce que oui, l'archéologie aurait été dans les choix d'études de Pierre Garand, s'il était retourné aux études à 25 ans comme il avait prévu le faire s'il n'avait pas «trouvé sa voie» ailleurs. Après son secondaire, avant son coup de foudre avec la scène du Pub 16, Garou s'était inscrit dans la fanfare des Forces canadiennes, qu'il a quittée en 1992.

«J'ai fait plein de choses, aussi: j'ai travaillé pour la Ville aux travaux publics, puis comme éboueur, briqueteur. J'ai vendu des chaussures, des montres, des vêtements. J'ai aussi été pompiste au garage de mon père», énumère celui qui remplit maintenant des salles de spectacles en France, en Pologne et en Russie, entre autres.

Si la soirée au Pub 16 fut une révélation pour Garou, son contact avec Luc Plamondon aura marqué un autre tremplin dans son cheminement. Pour faire une histoire courte, le célèbre parolier avait entendu parler de Garou, l'a entendu et l'a invité en audition pour Notre-Dame de Paris.

Le chanteur ne pensait pas que les concepteurs du drame musical l'avaient imaginé dans le rôle de Quasimodo. «Peut-être pour jouer un arbre, mais pas Quasimodo!», rigole-t-il en se souvenant de l'expérience de l'audition et surtout de son issue. «Artistiquement, c'était un défi. Ça m'a fait peur! Moi, j'étais un animateur de foule, un entertainer. Pas un chanteur, et pas un acteur!»

Même si plusieurs personnes le pressaient de sortir un disque en profitant du succès de Notre-Dame de Paris, Garou a préféré attendre. Attendre la bonne opportunité, comme il l'avait toujours fait même quand on lui avait proposé des contrats de disque pendant ses années de bar.

«J'ai toujours été très, très très instinctif. Il y a des choses que je comprends bien mais qui s'expliquent mal», indique-t-il pour soutenir son choix d'avoir attendu LE moment pour sortir son disque. Ce fameux moment a eu pour base une rencontre avec René Angelil et Céline Dion sur le plateau d'une émission de télé française.

C'est donc avec l'équipe de Céline qu'il a créé son premier album, Seul, en 2001. Ont suivi Reviens en 2004, Garou deux ans plus tard, Piece of my Soul en 2008 et Gentleman cambrioleur en décembre 2009.

Un album éclaté

Garou l'admet, c'est sa compagnie de disques qui a suggéré l'album de reprises. Initialement tiède à l'idée, le chanteur s'est ravisé en abordant le projet comme un défi, celui d'aller plus loin.

«Au lieu de faire un album pour que «ça vende», j'ai voulu faire un disque éclaté, évolué. Un album-projet flyé, disjoncté, qui me permette d'évoluer», explique celui qui a réuni sur Gentleman cambrioleur des pièces tirées des répertoires d'artistes aussi diversifiés que Madonna, Ariane Moffatt, Joe Dassin, Paul Simon et Cole Porter.

Des années 1950 à 2000, Garou a puisé dans une liste de chansons de plusieurs genres, mais s'est permis d'en trafiquer lesdits genres à plusieurs occasions. Le chanteur parle d'«audace» en décrivant le traitement qu'il a réservé aux pièces sélectionnées.

«Il y a une progression. I Love Paris est plus vintage, avec Sorry, on tombe dans le lounge, dans New Year's Day on va un peu plus deep, puis ça se met à lever avec Da Ya Think I'm Sexy», décrit-il.

Garou avait une idée en tête pour l'atmosphère qu'il souhaitait faire émaner de l'album. Il a proposé au réalisateur Philippe Paradis de s'inspirer du film Lost In Translation, dont une partie de l'action (ou de la non-action, c'est selon!) se déroule dans un hôtel de Shanghai.

«L'album, c'est cette soirée-là au bar de l'hôtel à Shanghai», résume-t-il.

En acceptant de faire un album de reprises, le chanteur avait posé ses conditions: «Un, que ce soit un album éclaté, deux, que je choisisse le réalisateur et trois, qu'on sorte un album original peu après». On peut donc s'attendre à un nouvel album de Garou d'ici la fin de l'année ou au début de la prochaine.